Lettres indiennes

Retrouvé, pour le partager immédiatement, dans le Fil et les traces de Carlo Ginzburg, ce passage de Montaigne si célèbre sur l’étonnement qu’il releva chez deux indiens du Brésil amenés à Rouen pour rencontrer le Roi de France – et dont la surprise naïve clôt le merveilleux chapitre XXX (Des Cannibales) de ses Essais :

“Ils dirent qu’ils trouvoient… fort estrange (…) (ils ont une façon de leur langage telle qu’ils nomment les hommes, moitié les uns des autres) qu’ils avoyent apperceu qu’il y avoit parmy nous des hommes pleins et gorgez de toutes sortes de commoditez, et que leurs moitiez estoient mendians à leurs portes, décharnez de faim et de pauvreté ; et trouvoient estrange comme ces moitiez icy necessiteuses, pouvoient souffrir une telle injustice, qu’ils ne prinsent les autres à la gorge, ou missent le feu à leurs maisons.”

Une surprise intacte, à laquelle l’actualité depuis semble toujours donner raison…